La couverture de l’accès à la contraception pour toutes n'est pas un "cadeau", c'est un investissement dans l'avenir des femmes au Canada

 

Lettre d'opinion de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC)

Ottawa, 15 Avril 2024 -- Aujourd'hui, quelque part au Canada, une femme devra choisir entre acheter de quoi manger, payer sa facture d'électricité, faire le plein de son réservoir d'essence – ou payer sa contraception.

Il n'est pas un secret que la hausse des coûts de presque tous les biens et services est devenue un fardeau important pour de nombreux Canadiens, mais neuf millions de femmes en âge de procréer au Canada supportent, pour la plupart seule, un coût supplémentaire, qui passe souvent inaperçu, mais qui est tout aussi fondamental pour notre mode de vie : les coûts de prévention des grossesses non désirées.

C'est pourquoi la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) a été ravie que le gouvernement fédéral ait annoncé le mois dernier son intention d'inclure une couverture universelle pour une gamme complète de contraceptifs dans le cadre législatif du Programme national d'assurance-médicaments; le Projet de loi C-64. Il s'agit d'une mesure que la SOGC préconise depuis longtemps, puisque l'accès à la contraception est non seulement une question de droits en matière de reproduction, mais aussi un aspect fondamental de la santé publique et de l'équité femme-homme.

Bien que nous avons salué et applaudi l'intention et les premières étapes que cette annonce représente, les prochaines étapes seront cruciales pour la manière dont les femmes canadiennes et les professionnels de la santé mesureront l'engagement du gouvernement fédéral envers la santé des femmes et les options en matière de santé reproductive.

Il y a urgence d'adopter ce projet de loi pour garantir que l'engagement en faveur d'une contraception gratuite soit inscrit dans la loi dès que possible. Nous devons voir un engagement ferme de la part du gouvernement fédéral à travailler en collaboration avec les provinces, les territoires et les Premières Nations pour négocier un plan de mise en œuvre qui garantisse aux femmes et à la communauté LGBTQ+ dans chaque coin du pays l'accès aux options de contrôle des naissances qui leur conviennent le mieux. Et nous devons voir un engagement dédié et suffisant de fonds fédéraux pour garantir que le travail de mise en œuvre de cette politique basée sur le modèle de la Colombie-Britannique.

Pourquoi est-ce si important?

La contraception permet aux femmes de planifier leur grossesses, leur famille et leurs vie.. Elles sont plus susceptibles de terminer leurs études, de participer plus activement aux besoins grandissants en ressources humaines, de bénéficier d'une plus grande stabilité économique et d'avoir des grossesses en bonne santé lorsqu'elles choisissent d'avoir des enfants.

Mais les obstacles financiers peuvent limiter les options de contraception pour de nombreuses femmes. Le Canada adopte actuellement une approche fragmentée de la couverture, qui varie en fonction du revenu, de l'endroit où vous habitez ou de la couverture d’assurance de votre partenaire de vie. Cela oblige certaines femmes à choisir la méthode la moins chère, pas nécessairement la plus efficace, ou à ne pas utiliser de méthode de contraception du tout. Cela entraîne parfois une grossesse non désirée. Nous constatons cela chaque semaine dans nos pratiques. Nous pouvons faire mieux que cela pour les femmes canadiennes.

Environ 40% des grossesses au Canada sont non plannifiées. Cela n'affecte pas seulement les femmes et leurs familles, cela affecte l'économie. Le coût direct des grossesses non désirées au Canada est estimé à au moins $320 millions de dollars par an - un chiffre qui n'inclut pas les coûts indirects pour la société ou pour les parents.

Lorsque la Colombie-Britannique a rendu la contraception sur ordonnance gratuite l'année dernière, les estimations de modélisation ont montré une neutralité des coûts à mi-parcours de la deuxième année de financement. D'ici 2027, les résidents de la Colombie-Britannique économiseront 5 dollars pour chaque dollar investi dans la contraception. La démonstration de l’impact économique est clair. Une couverture universelle d'une gamme complète de contraceptifs garantira aux femmes les outils pour mieux contrôler leur avenir. Cela en fait un investissement dans l'avenir du Canada.

En tant que voix nationale pour la santé des femmes, la SOGC exhorte le gouvernement fédéral à garantir que des fonds dédiés soient affectés à la couverture universelle des contraceptifs dans le budget 2024 tel qu’il a été annoncé à Toronto le 30 mars 2024. Les gouvernements provinciaux doivent travailler avec le gouvernement fédéral et adopter un nouveau modèle de couverture pour garantir que les femmes ne rencontrent plus de barrières en fonction de leur lieu de résidence. Beaucoup de nos patientes demandent quand cela sera disponible, puisque ce n'est jamais assez tôt pour ceux qui se trouvent dans des situations économiques difficiles.

Annoncer cette mesure et introduire une législation est une première étape importante pour permettre l’application du modèle économique– mais maintenant nous devons voir des actions tangibles pour démontrer un engagement en matière de financement et d'adoption de cette législation qui garantira que les besoins en matière de soins de santé reproductive des femmes canadiennes et leur avenir sont une priorité et continueront d'être prioritaires pour les générations futures.

Cordialement,

Dre Amanda Black, Présidente, SOGC

Dre Diane Francoeur, PDG, SOGC